Critique historique du rituel Gardnérien par Adama

Critique historique du rituel Gardnérien par Adama

 

Dans le domaine des religions, l'Université a crée le domaine de la critique historique, permettant de mieux comprendre, de mieux cerner des contextes, et d'apporter des éléments de recherches nouveaux et des réflexions. Ce domaine s'applique à tous les textes sacrés ou rituels des différentes religions, et il serait intéressant d'appliquer cette méthodologie à la Wicca, afin de mieux en comprendre les héritages et les influences.

 

Le rituel Gardnérien est à ce titre très intéressant, et nous pouvons d'ores et déjà y déceler plusieurs influences, qui ont font un rituel syncrétique, mais qui garde sa propre cohésion dans une remarquable construction logique.

 

Le rituel est du à Gérard Gardner, qui comme nous le savons de nos jours, s'est largement inspiré de différentes traditions, dont certaines n'ont paradoxalement rien à voir avec la Magie ou la Sorcellerie, et qui dans le cadre « Gardnérien » trouvent une place originale, dans un contexte qui se veut « magique et archaïque » au sens de première religion. La critique historique de ce rituel permets de dire que c'est une composition moderne, mais qui se veut inspirée par son créateur par le passé, dans la vision qu'il en retira du travail ethnologique et anthropologique de Margaret Murray. Cette dernière étant avant tout une grande égyptologue, qui avait participée à l'étude de momies et d'artefacts égyptiens.

 

Examinons sans plus tarder les strates provenant de différentes traditions, qui sont visibles dans le rituel Gardnérien.

 

L'influence mystique chrétienne et catholique :

 

Oui aussi surprenant que cela puisse paraître, nous pouvons déceler une influence de certaines pratiques en usage dans la mystique chrétienne et nous le verrons catholique :

 

 

Un calice plein de vin : est une influence du rite de l'Eucharistie dans l'Eglise catholique. Gardner y verra bien sur la représentation du Saint Graal, la Sainte Coupe étant à l'origine dans l'Eglise catholique l'image emblématique du calice de l'Eucharistie. Mais en replaçant ce calice dans l'influence du Saint Graal, Gardner va privilégier l'hypothèse de l'origine celte du Graal, et pourra donc l'ajouter au rituel qui porte son nom. A noter que l'usage d'un calice rempli de vin était également employé au XVIII e s. par des prêtres catholiques déviants qui pratiquaient dans le secret les célèbres messes noires, qui étaient un simulacre d'une Messe, il s'agissait alors de la communion avec Satan et ses légions, qu'avec Dieu. Mais il semble que Gardner se soit plutôt inspiré du Graal en effet, dont il connaissait bien les légendes, bien qu'il devait forcément connaître les traditions des anciens prêtres dévoyés.

 

 

Du pain pour communier : Autre ajout d'origine chrétienne. Le partage du  pain est typiquement chrétien et également en usage dans le Judaïsme. Toutes les confessions chrétiennes partagent le pain, et dans le Judaïsme, le jour du Shabbath pendant le Kiddoush, le pain et le vin sont bénis et distribués aux assistants. La manière de faire ici est semblable dans la Wicca gardnérienne, mais le fond en est changé bien sur, ici c'est la communion avec la nature et ses forces. Mais l'origine du rite est bien Judéo-chrétien sans aucun doute possible. Nous pensons que Gardner qui possédait le grade de Rose-Croix au sein de la Franc-Maçonnerie, grade christique, a tout simplement adapté le partage du pain et du vin, pour la création de son rituel.

 

Un fouet : Le fouet est une influence directe du silice des mystiques catholiques ou « fous de Dieu » et c'est un grand paradoxe que de retrouver la flagellation dans une religion qui se veut sorcière ! Certains pensent que Gardner à voulu faire un pied de nez aux catholiques en introduisant une pratique similaire, ou alors, a été ici influencé par son ami Aleister Crowley dont les tendances sado-masochistes sont bien connues, mais il faut le signaler, encore controversées parmi les spécialistes.

 

 

« Le premier prend la coupelle d'eau et suit le cercle dans le sens des aiguilles d'une montre (partant du Nord, il termine au Nord) en aspergeant sa matérialisation. Puis il termine en aspergeant les membres du coven. Si c'est un homme qui officie, il asperge en dernier la grande prêtresse qui lui retourne l'aspersion, si c'est une femme, elle asperge en dernier le grand prêtre qui lui retourne l'aspersion. La coupelle est reposée sur l'autel. » Le rituel d'aspersion décrit ici est d'origine égyptienne, on en retrouve d'identique dans les anciens textes de la religion égyptienne. Cette pratique existe, mais sous une forme différente dans le  Judéo-Christianisme. Cela a été adapté pour renforcer le sentiment de communion dans le rituel Wiccan gardnérien.

 

 

Le grand prêtre et la grande prêtresse se tiennent devant l'autel, lui faisant face. Gardner ici reprend la position traditionnelles des prêtres catholiques d'avant la réforme de Vatican II qui à son époque n'avait pas encore eu lieue. Dans l'antiquité païenne, il n'y avait pas d'autel de ce type, les prêtres officiaient devant des idoles diverses, vers lesquelles ont disaient des incantations, faisaient des offrandes diverses, et dansaient.

 

 

Les influences maçonniques :

 

 

« elle lui fait effectuer une circumambulation »: cette pratique est bien connue dans les différents rites maçonniques, où la circumambulation dextrogire ou sinistrogire, a effectivement en revanche, d'authentique origine ésotérique et occulte.

 

 

 

 

 

« Le grand prêtre admet de la même façon une femme dans le cercle. Celle-ci admet de même un homme… on procède ainsi jusqu'à ce que tous les membres du Coven soient entrés dans le cercle » : Ici la méthode semble calquée sur la chaîne d'union des francs-maçons formant un cercle… et aussi sur le «cercle de prière » des rites secrets Mormons. Gardner n'a ici rien inventé…cela existe depuis bien longtemps, et c'est une pratique tout à fait traditionnelle.

 

 

« La grande prêtresse désigne alors trois membres du coven pour renforcer le cercle » : autre influence maçonnique, nous pouvons voir en ces trois membres les fameuses 3 colonnettes Force, Sagesse et Beauté, qui renforcent la loge dans le rituel maçonnique.

 

 

« Le grand prêtre fait maintenant « descendre la lune » sur la grande prêtresse. Elle se tient le dos tourné à l'autel, les bras en croix de Saint André sur la poitrine (les mains à la hauteur des épaules, les coudes à la hauteur des basses côtes, elle tient dans sa main droite un athamé, dans la gauche une baguette magique). » Influence directe du grade de Rose-Croix de l'Ordre maçonnique, la prêtresse fait tout simplement le signe du « bon pasteur » dont l'origine par contre, se perd dans la nuit des temps. On retrouve le signe du bon pasteur en Egypte notamment, ce qui n'est pas étonnant, les plus anciennes légendes relatives aux Rose-Croix les font descendre de la civilisation égyptienne.  Ce signe est le signe de reconnaissance des Rose-Croix entre eux. Sans le savoir, la prêtresse Wicca honore la Rose et la Croix par ce signe de la Fraternité R + C. C'est sans doute l'aspect le plus étonnant du rituel Wiccan.

 

 

 

« Le grand prêtre : « 1°) Bénis soient ces pieds qui t'ont amené jusqu'à nous ! (le grand prêtre les embrasse).

 2°) Bénis soient ces genoux qui ploient devant l'autel ! (le grand prêtre les embrasse).

3°) Béni soit ce sexe sans lequel nous ne serions pas ! (le grand prêtre l'embrasse. A ce moment la grande prêtresse ouvre ses bras et les dresse vers le ciel).

 4°) Bénis soit cette poitrine, belle et forte ! (le grand prêtre l'embrasse).

5°)Bénis soient ces lèvres qui récitent les paroles sacrées ! (le grand prêtre les embrasse). » 

 

C'est ici la transcription Wicca des 5 points parfaits de la Maîtrise maçonnique. La transcription ici est simplement le fait que nous ne sommes plus dans le symbole, mais dans l'action avec le « toucher ».  C'est dans le rituel Wiccan gardnérien, la trace la plus tangible et forte de l'influence maçonnique.

 

« L'étoile d'amour et de plaisir » : ce terme est l'adaptation « crowley » de l'étoile flamboyante bien connue des francs-maçons.

 

Influence de la Matière de Bretagne et des romans de la Table Ronde :

 

 

« Ma loi est l'amour de tous. Gardez pur votre plus haut idéal, tentez toujours de l'atteindre, que rien ne vous en détourne. Mienne est la porte secrète qui ouvre sur la terre de la jeunesse, mienne en est la coupe du vin de la vie et le chaudron de Cerridwen qui est le Saint Graal de l'immortalité.  Je suis la Déesse gracieuse qui met la joie dans le cœur de l'homme. Sur terre, je donne la connaissance de l'esprit éternel. Après la mort, je donne la paix et la liberté, et je réunis ceux qui se connaissent dans le monde visible. Je n'exige pas de sacrifice car je suis la mère de tout ce qui vit et je déverse mon amour sur la terre. »


Ce passage est inspiré de la Chevalerie célestielle d'Arthur et des chevaliers de la Table Ronde, la mention du Chaudron de Cerridwen comme le Saint Graal permets de lever tous les doutes à ce propos. En effet, dans la Matière de Bretagne, le chaudron de Cerridwen est l'un des 12 objets magiques de Bretagne, et il est l'image archétypale du Saint Graal. C'est le lien entre le monde ancien (païen) et le monde actuel (chrétien), pour les romans de la Table Ronde. Avec cette phrase, les Wiccans se placent sans le savoir ou en le sachant pour certains, dans l'idéal de la chevalerie de la Table Ronde.

 

Influence de la Cabale et des divinités Egypto-chrétiennes :

 

Les invocations comme :

 

 

 «  Bagahi laca bachabé

Lamac cahi achababé

Karrelyos

Lamac la mec bachalyos

Cabahagi sabalyos

Baryolas

Lagozatha cabyolas

Samahac et famyolas

Harrahya ! »

 

 

Semblent être tiré de l'Araméen, langue utilisée pour les écrits cabalistiques, et la phrase « lamac cahi achababé » pourrait signifier par exemple si l'ont traduit par « Pourquoi le frère de mon père est maître », autre possibilité « Pourquoi il est le frère de mon père papa »… Cela peut faire sourire, mais c'est une possibilité.

 

Bachalyos, Sabalyos, Baryolas, semblent être des déformations de divinités inconnues que l'ont retrouve dans les écrits gnostiques égyptiens d'Alexandrie notamment. Et qui étaient employés dans les prières des premiers chrétiens d'Egypte !

 

Har rah Ya est l'ironie du sort, car ce mot est bien un mot hébreu et il signifie : Je regarde la colline de Yahvé ! C'est vraiment incroyable, mais c'est bien cela que cela signifie… Et la colline de Yahvé renvoie au Mont Sinaï.

 

Comme l'hébreu à plusieurs sens en voici un autre :

 

Har = Interjection signifiant « ah ! ah ! Cri de satisfaction », autrement dit Ma satisfaction dans mon regard en Yahvé…

 

Je sais que cela va surprendre, mais pourtant c'est bien la traduction du mot « Harrahya » qui n'est qu'un terme hébraïque appartenant à ce que l'ont nomme la mystique des palais, autrement dit la mystique juive.

 

Les mystères du Rituel :

 

Il reste un vrai mystère dans le rituel Gardnérien, et il est dans l'appel Wiccan :

 

Eko ! Eko ! Eko ! Azarak…

 

Eko se retrouve étrangement dans un mot de la langue des amérindiens d'origine Maya du Mexique. Et c'est très intéressant. Comment Gardner à pu connaître cela ?

 

 

Notons que l'évocation « Eko Eko Eko Azarak » a donné le nom à une série japonaise sur les aventures d'une petite sorcière !

 

 

Conclusion :

 

Le rituel Gardnérien est syncrétique et il se nourrie de différentes traditions comme nous venons de le voir. Mais il offre une véritable homogénéité, bien que son authenticité dans l'ancrage à la tradition première soit très discutable en raison de ces apports récents, intégrés et mis en forme par le génial Gérald Gardner. En revanche, il offre pour le monde moderne, une belle pratique, esthétique et générant de véritables égrégores magiques.

 

Certains critiques ce rituel, pour dire qu'il est générateur je cite « d'infestation larvaire », terme employé en magie lorsque l'on « joue » avec des éléments non anodins sans le savoir, et qui après vous retombe dessus sans même le savoir. On a eu des exemples par exemple de Martinistes (ésotérisme christique) venant au secours de Wiccans qui avaient des problèmes dans l'occulte. Mais en fait, ces exemples qui existent mais qui sont rares, sont plutôt le fait d'individus que du système Wicca. 

 

Pour ma part, je me rangerais dans l'opinion du CESNUR du Professeur Massimo Introvigne en Italie, qui étudie les nouvelles religions. Wicca est une religion nouvelle, avec des bases originales, mais qui reste encore multiformes et qui sans doute le restera. Il y a pour ce centre d'études universitaires sur la Wicca entre autres domaines, autant de Wicca qu'il existe de Wiccans ! Cela est du au fait que la Wicca ne connaît pas de « pape » ou de « chef », et que la pratique reste très libre. Même si les Gardnériens ont tendance quelquefois à s'ériger en « gardiens du rite », pourtant le rite Gardnérien à proprement parlé est peut être le moins sorcier qu'il soit, se rattachant à différents courants qui n'ont rien à voir avec la magie ou la sorcellerie !

 

La Wicca actuellement connaît des métamorphoses impressionnantes, et certaines de ses formes actuelles n'ont plus qu'un rapport lointain avec la Wicca des « pères fondateurs ».

Cette Wicca est représenté avec le courant développé par Scot Cunningham, qui se débarrasse d'une part du côté trop « sexuel »  et quelquefois « obscur » de la Wicca gardnérienne et d'autre part, du système des grades de cette dernière, directement copié sur les grades de la Franc-Maçonnerie, et à ce titre, Cunningham a raison, les grades n'ont aucune valeur dans la sorcellerie traditionnelle, les grades proviennent des structures initiatiques maçonniques et rosicruciennes dans toutes leur déclinaisons possibles.

 

Cette nouvelle Wicca se veut volontiers écologique, et revient vers un ésotérisme et un occultisme traditionnel, vers la connaissance des plantes et des remèdes, en cela, elle renoue avec la tradition authentique des campagnes, des « rebouteux de village », des « leveurs de feu » et autres « guérisseurs », qui sont des gens qui ont des dons et un héritage qui lui, vient en droite ligne du plus lointain passé de l'humanité. C'est un retour finalement vers le souhait des fondateurs qui voulaient connaître la « première religion », bien que cette notion soit arbitraire comme l'a montré la recherche archéologique. Les temps anciens ayant connus une multitude de religions et non pas une seule, mais toute avec une idée certaine du monothéisme qui se serait dégradé en polythéisme, c'est l'une des thèses actuelles qui rejoint en cela ce que disaient le sages Juifs depuis toujours, et les prêtres de l'Egypte ancienne. C'est à dire que l'idée d'un Dieu Un fut décliné en plusieurs qui ne sont que les hypostases de ce Dieu. La notion de « couple divin » pouvant être également très possible.

 

La Wicca propose donc une approche de la Nature et du respect du monde tout à fait noble et digne de respect. Cette foi est aussi authentique que celle d'une autre religion. Bien que sa théologie soit très simple, en fait, il s'agirait plutôt d'une « orthopraxie naturelle » que d'une religion au sens de « relier les individus », personnellement j'opterais volontiers pour le terme d'une philosophie naturelle plus que d'une religion. En cela je vois la Wicca dans sa manière d'être assez proche du Bouddhisme dans le fond mais pas dans la forme.

 

Enfin pour être complet, beaucoup de Wiccans se penchent sur les origines, et forment les premiers « érudits Wiccans » de l'histoire, voici un lien qui vous propose d'autres pistes :

 

 

http://www.le-sidh.org/site/article_396.html

 

Les recherches sont ouvertes….et le champ d'investigation du domaine Wiccan ne fait que commencer. Nous sommes donc des pionniers, et c'est passionnant !

 

Eko ! Eko ! Eko !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



17/07/2007
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